• Ce joli yaourt à la framboise posé devant toi. Sortant à l'instant du réfrigérateur, il est frais. Avant même d'avoir enfourné la première becquée, son parfum t'envahit et sa fraîcheur te saisit. Tu sens à l'avance ce délicieux liquide couler dans ta gorge, lentement, avant de se perdre dans ce ventre, qui, si le repas avait été un gâteau, n'attend plus que sa cerise. Visualisant soudain les livres et les feuilles volantes gisant sur ton bureau, tu décides de te concentrer sur cette première cuillerée. Instant magique, excitant. Moment de bonheur certain. Le temps s'est arrêté, et toi tu savoures.


    " C'était quoi les gros titres, aux informations? "


    Soubresaut, la cuillère fait un vol plané, une tâche du précieux liquide s'étale à côté de l'assiette.


    " Euh.. Les ai pas vus... "


    Mensonge ! Tu les a vu. Enfin, tu as surtout vu le premier reportage. La "une". LE gros titre, LA grosse info. Cette histoire de cannibalisme, dans la prison de Rouen. Tu a vu ces quelques images de la prison, l'interview de son directeur. Entendu le récit de cette nuit pas ordinaire, raconté sur des images d'archives inintéressantes, comme pour ne pas empêcher le téléspectateur de s'imaginer la scène. L'emploi exagéré de superlatifs eschatologiques (merci Marie), recours au hyperboles apocalyptiques. Et comme on a rien à dire, on se réfugie promptement dans la polémique. Dégoûtant, tu as vite éteint la télé.


    Et voilà qu'on te demande ce qu'il y avait, justement, à ce foutu journal télévisé. La cuillère a repris sa place dans ta main, mais cette fois elle hésite. Epargne-leur cette histoire, ils sont en train de manger. Mais toi aussi tu es en train de manger. Nonchalamment, la cuillère a repris le chamin de ta bouche. Seulement, le coeur n'y est plus. Toi aussi, cette nouvelle t'a fait bondir de ton lit. C'était jeudi matin, et ce n'était que le début de l'affaire. Toi aussi tu t'es précipité pour en savoir plus, pour connaître les détails, pour répandre l'information. Toi aussi tu fais partie de cette masse populaire à qui l'on sert l'actualité comme on sert de la viande aux lions.


    Et d'un coup, la cuillère plantée dans la bouche, tu les vois, ces millions de français, en train de mettre leurs cuillères dans leurs bouches, écoutant religieusement les commentaires horrifiés du journaliste. "C'est ignoble" prononceraient-ils, en terminant leur yaourt. "Comment cela est-ce possible?" se demanderaient-ils en épluchant leur clémentine. Puis il y aurait un nouveau silence. On rappellerait ces histoires de cannibalisme, remontant jusque dans les années 60 (parce qu'avant, pas d'image), ces histoires de fou, ces décérébrés mentaux. Puis la fin du reportage aurait été consacrée à Armin Meiwes, le fameux cannibale de Rotenburg. Enfin, la présentatrice aurait conclut sur un laconique "affaire à suivre"... Transition. On passe au sujet suivant. Et on mange la clémentine en se disant que, décidément, on vit dans un monde insensé.


    Les gens sont vraiment cons. Du moins, on les prend pour des cons. Le drame, c'est que rien ne prouve que l'on se trompe...


    Ce soir, je n'ai pas fini mon yaourt.


    Nico


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  • 01/01/07 23:36
    BAGDAD (AFP) - L'assassinat d'un journaliste relance la controverse


    L'exécution de Saddam Hussein proclamée et diffusée par toutes les télévisions du monde depuis samedi matin ne serait qu'une immense supercherie, qui aurait permis à l'ancien dictateur -en réalité encore vivant- d'échapper à la mort, au nez et à la barbe de l'administration américaine, spectatrice impuissante de cette machinerie. C'était du moins la thèse défendue par Mohamed Slaoui, collaborateur du journal irakien Al-Mada, dès l'annonce de la mort du Raïs. Qualifié d'illuminé, dénigré même par son propre journal, il est mort dans l'explosion de sa voiture en début de soirée. Un assassinat qui, paradoxalement, donne du crédit à sa thèse si controversée.


    Dès le début de semaine dernière, le journaliste confiait son scepticisme quant au résultat de la livraison de Saddam Hussein par les américains au gouvernement Irakien. "Comment [Hussein] peut-il être exécuté alors que nombre de ses proches gravitent encore autour du pouvoir et du gouvernement? [...] De plus, les Etats-Unis ont besoin de se débarrasser au plus vite de Saddam, et les dirigeants irakiens le savent bien. Il sera traité comme un roi, et servira comme moyen de pression sur l'administration Bush" expliquait Slaoui au journal suédois Expressen mardi 26 décembre.


    C'est samedi dernier, 30 décembre, alors que l'exécution de Saddam Hussein est diffusée en boucle sur toutes les chaînes d'information, que la voix discordante de Slaoui se fait entendre. Se basant sur une information obtenue auprès d'un de ses informateur, "quelqu'un de très haut placé", il explique que l'ancien dictateur a été transféré en toute discrétion dans une prison secrète, située à une soixantaine de kilomètres à l'ouest de Bagdad. Drogué ou adulateur, l'homme exécuté dans la nuit de vendredi à samedi serait donc en réalité non pas Saddam Hussein mais... un de ces sosies dont le dictateur usait pour quadriller au mieux son territoire!


    Pourquoi faire croire à la mort de Saddam? Parce que d'une part, il fallait respecter la décision du tribunal pénal irakien. Et parce que d'autre part les dirigeants irakiens ont compris combien les différents procès auxquels devait être soumis le Raïs pouvaient déranger. Laisser Saddam Hussein se défendre, c'était dévoiler un jour ou l'autre que les Etats-Unis -mais aussi la France- ont fermé les yeux sur nombre de massacres tout en s'efforçant de faire de l'Irak une puissance militaire de premier ordre au cours des années 80. Laisser Saddam Hussein se défendre, c'était aussi courir le risque qu'il dépasse les soixante-dix ans, âge au-delà duquel un condamné ne peut être exécuté en Irak. Un ancien dictateur vivant et en prison, autrement dit une bombe à retardement très gênante pour la communauté internationale. Or, à l'heure de la négociation de nombreux contrats pétroliers et des discussions concernant le retrait de l'armée américaine, il est bien utile pour les dirigeants irakiens de disposer d'un tel moyen de pression.


    Si Saddam Hussein est effectivement encore en vie, alors l'administration Bush a du soucis à se faire.


    N.I.


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  • Une nouvelle année qui s'achève.. Je ne sais pas vous, mais moi, le 31 décembre, il m'a toujours un peu effrayé.


    Parce que avec toutes ces histoires de rétrospectives de l'année écoulée, et de bonnes résolutions pour l'année qui arrive, c'est comme si le monde changeait, comme si demain tout serait différent. Comme si ce soir à minuit, hop un rideau tombait, et bim! nous voilà dans un nouveau monde, un nouvel univers, une nouvelle année...


    Et puis au bout de deux ou trois jours, on se rend compte que finalement, rien n'a changé. On est toujours seul, toujours en train de bosser -ou du moins d'essayer-, et le ciel ne nous est toujours pas tombé sur la tête. Et puis, surtout, les sacro-saintes résolutions n'ont, comme toujours, fait illusion que quelques heures. En fait, c'est juste un symbole, preuve le changement nous fait peur. Mais au bout du compte...


    En parlant de nouvelle année, entre l'assassinat de Saddam commandité par Bush et la mystérieuse convalescence de Fidel Castro, on en oublierai presque que l'Union Européenne va s'élargir. Demain, lundi 1er janvier 2007, l'UE comptera 27 états membres. Personne ne semble s'en soucier. C'est ce qu'on appellera plus tard l'échec de l'Europe.


    Bonnes fêtes,


    Nico


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  • Il y a quarante-huit heures à peine, le président à vie du Turkménistan, Saparmourad Nyazov, est décédé. Laissant derrière lui un pays dans le chaos d'une sanguinaire dictature. Ainsi un tiers de la population turkmène a déjà été en prison, où 20% des détenus meurent. Une situation sanitaire critique, et un endoctrinement total (Nyazov étant vanté dans son pays aussi important que Bush ou Poutine). Certains se souviennent de ce reportage de Catherine Berthillier tourné en clandestinité pour Envoyé Spécial (et pour lequel deux innocents sont morts en prison, coupables d'avoir collaboré avec la journaliste). On y voyait une population crevant de faim dans les campagnes. Et puis une capitale magnifique, toute en or et en marbre, avec des monuments à la gloire de Nyazov. Des bâtiments et monuments construits par une importante entreprise de BTP. Ne cherchez pas trop loin, on la connaît tous: c'est Bouygues, évidemment.


    Le plus drôle à vrai dire, c'est cette vidéo (trouvée chez Télérama). De voir comment Bouygues s'est servi de sa filiale, TF1, pour séduire le président trukmène et obtenir de juteux contrats. D'ailleurs réduire cette manipulation à Bouygues ne serait pas juste, ainsi EDF et GDF ont aussi joué le jeu. Quel jeu?


    Nous sommes en 1996. Le président Nyazov vient d'être reçu à l'Elysée par Jacques Chirac. Pour s'attirer les bonnes grâces du président turkmène, Bouygues fait enregistrer à TF1 une vraie-fausse émission spéciale. Dirigée, s'il vous plaît, par le responsable-adjoint de l'information de l'époque, Jean-Claude Narcy. Et comme invités, ni plus ni moins que Martin Bouygues, Patrick Le Lay (PDG de TF1), le président de Gaz de France, et un important dirigeant d'EDF. Cette émission, tournée à la gloire de Nyazov, n'a bien évidemment jamais été diffusée. Si vous avez quarante minutes à perdre, c'est très intéressant de voir comment Nyazov semble se préoccuper de son peuple...






    TF1, Bouygues et le Turkmenistan
    envoyé par rougememoire


    Promis, plus tard, j'achèterais une grande chaîne de télévision.


    Nico


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  • Heureusement que, au milieu d'une actualité sanglante et dramatique, les médias arrivent encore à nous faire rire. A commencer par la télévision belge qui n'a trouvé mieux hier que de réaliser l'un des plus beaux canulars de l'histoire télévisuelle... On ne les changera pas, eux !


    Pas mal non plus, la lecture de l'Express. Lecture attentive en cours d'histoire contemporaine m'arrachant de nombreux sourires. La langue de bois laissée au vestiaire, on peut enfin se marrer.


    Question posée au sarkoziste Devedjian: si Ségolène Royal était... un personnage de film? Réponse: Scarlett O'Hara, car malgré sa combativité, ou à cause d'elle, elle a tout perdu.
    Un sportif? Véronique et Davina.
    Un tableau? Les tournesols de Van Gogh: elle se tourne vers l'opinion comme eux vers le soleil.
    Un accessoire? Un pêle-mêle: ses prises de position n'ont de point commun que l'utilité du moment.


    Mais ce n'est pas fini. Les mêmes questions posées cette fois au "royaliste" Montebourg, si Nicolas Sarkozy était... une bataille de l'histoire? Trafalgar, une défaite humiliante et un cas d'école d'erreur stratégique.
    Une arme? Un kärcher.
    Un tableau? Narcisse, qui voit son reflet dans l'eau et en tombe amoureux.
    Un sportif? Richard Virenque, qui n'a jamais gagné le tour de France malgré ses efforts variés et contestables pour y arriver.
    Un accessoire? Des talonnettes.


    Vive la politique ! Heureusement, la campagne présidentielle ne fait que commencer. Ce qui nous promet encore de longues heures de poilade, pour le plus grand bonheur des étudiants qui s'emmerdent au fond de la classe !


    Nico


    3 commentaires


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